Portrait

Yonathan 1

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

YONATHAN AVISHAI

La voie de l'essentiel

 

    S'il réside près de Joigny dans l'Yonne (89), le pianiste franco-israélien Yonathan Avishai rayonne souvent jusqu'en dehors de nos frontières pour assurer ses nombreux concerts. On doit à ce musicien un jazz épuré, subtil, innovant et, pour tout dire, terriblement séduisant.

    Un visage ouvert, souriant, un regard brillant et décidé, une voix posée et affable... une rencontre avec Yonathan Avishai se place d'emblée sous le signe d'une simplicité directe et chaleureuse. Né en 1977 à Tel Aviv, Yonathan Avishai se montre très tôt passionné par la musique. "Lorsque j'étais enfant, l'écoute des disques et les moments passés aux concerts me mettaient, selon les dires de mes parents, dans un "drôle d'état...", confie-t-il. Porté par des dispositions favorables, il commence le piano à l'âge de 4 ans à Tokyo où réside temporairement sa famille. De retour en Israël, il poursuit des études musicales classiques tout en éprouvant déjà le désir d'aller au-delà de la relation avec la partition et le besoin d'improviser. A l'adolescence, sa ferveur le mène vers hip-hop, funk et fusion avant qu'elle ne l'entraine vers le jazz auquel il décide de se consacrer entièrement.
    Après plusieurs formations, il débute à 16 ans dans les bars de Tel Aviv. Ses rencontres de l'époque sont déterminantes : "A Tel Aviv, j'ai eu la bonne fortune de fréquenter de merveilleux musiciens tels que le saxophoniste Walter Blanding qui est toujours un des membres du Jazz at Lincoln Center Orchestra de Wynton Marsalis, mais aussi bien d'autres. Ma proximité avec le saxophoniste Arnie Lawrence a également beaucoup compté."
    Yonathan Avishai s'installe en France en 2000. Sa notoriété monte en puissance. Une date majeure : ce concert de Barcelone de 2002 réunissant Omer Avital (contrebasse), Avishai Cohen (trompette), Daniel Freedman (batterie), concert à la suite duquel ils fonderont le groupe Third World Love (cinq albums). Sa discographie s'étoffera ensuite avec le concours d'autres instrumentistes pour se prolonger avec cette pièce-maitresse qu'est Modern Times (2015), premier album comme leader avec Yoni Zelnik (contrebasse) et Donald Kontomanou (batterie). En 2016, le second opus de Modern Times intitulé The Parade — même personnel augmenté de César Poirier (saxophone alto, clarinette) et d'Inor Sotolongo (percussions) — voit le jour1.
    Le jazz façon Yonathan Avishai exhale une beauté sobre magnifiquement expressive. "Minimaliste" est un qualificatif qui s'attache spontanément à son jeu, à ses compositions. "D'une part, d'une manière naturelle, je suis quelqu'un qui préfère les choses un petit peu lentes et pas trop chargées. Et d'autre part, mon expérience de musicien m'a amené à penser que quand on réduit un certain nombre d'éléments, ces derniers se "chargent" davantage, se révèlent davantage. Le fait d'utiliser quelque chose de "réduit" oblige à aller à l'essentiel."
    Dans sa démarche musicale, Yonathan Avishai veille aussi à maintenir une connexion profonde avec le jazz ancien : "Je reste toujours captivé et ému par la naissance du jazz, par tout ce qui s'est passé au début du XXe siècle, voire avant, au sein la communauté jazz américaine. Je pense souvent à cette période et je ressens à chaque fois comme un choc."
    Impossible pour finir de manquer à l'annonce, faite sous le ciel ensoleillé de Joigny, de cet heureux évènement : l'arrivée imminente dans les bacs du troisième volet de Modern Times.

                                                                                              Didier Robrieux

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1. Voir comptes rendus de ces deux albums à la rubrique "Articles / Jazz - Disques" de ce site.

Photo : Chris Boyer

© Tempo
[article publié
dans magazine jazz Tempo
n° 64 - octobre 2017 - version papier
et version numérique]

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